Zach Williams and The Reformation :
A Southern Offering (CD 2011)
Titles :
01. Gravy Train
02. Mason Jar
03. Fools' Moon
04. Moving On
05. Picture Perfect
06. The Fix
07. Motels And Highways
08. Rock 'N' Roll Me
09. PO Box And A Postcard
10. Wishing Well
11. Sky Full Of Treasures
Personnal :
Zach Williams : vocals, harp and acoustic guitar,
Red Dorton : bass, backing vocals
Creed Slater : drums, backing vocals
Barry Fowler : lead guitars
Robby Rigsbee : lead/slide guitars
Josh Copeland : lead guitars, backing vocals (played on album only)
Les voies du rock sont parfois impénétrables. Rien n'obligeait Zach Williams, sous pression au milieu d'un divorce sordide, à aller au concert de Further Down, un obscur combo de l'Arkansas, ni à lier une amitié arrosée avec les membres du groupe. Tout ce joli petit monde ayant pris pour habitude de se réunir chez lui pour faire le bœuf avec force guitares, les membres de Further Down finirent par s'apercevoir qu'outre un joli brin de voix, leur nouvel ami disposait d'un paquet incroyable d'étonnantes compositions qu'il n'avait jamais pu utiliser malgré ses envies, puisqu'il n'avait jamais joué en groupe ! Ni une ni deux, voilà la majeure partie de Further Down qui se met à la disposition du néophyte et qui commence à tourner avec lui, et la mayonnaise prend de manière incontestable, signant par là à la fois l'arrêt de mort de Further Down et l'acte de naissance de The Reformation !
Après un premier album prometteur (Electric Revival) paru en avril 2009, nos descendants de l'ancienne Louisiane française (le nom de l'Etat vient de l'interprétation française d'un mot sioux, et l'état lui-même se situe en plein sud profond, bordé par la Louisiane, le Texas, l'Oklahoma, le Tenessee, le Mississipi et le Missouri) ont remis le couvert l'an dernier avec l'objet de cette chronique, fièrement baptisé « A Southern Offering » (un cadeau sudiste, ou une collecte).
A l'écoute, on ne tarde pas à s'apercevoir que les gars n'ont pas menti : cet album est un véritable cadeau. Dès le premier titre (« Gravy Train »), Robby Rigsbee met tout le monde dans le bain à grandes lampées de slide, et provoque le duel avec la wah-wah de Barry Fowler, le tout venant agrémenter un morceau bien rentre dedans, avec refrain hymne. Purée, c'est du bon, du râpeux ! Le titre suivant s'appuie sur d'autres racines, moins rock'n roll, mais offrant un curieux mélange entre acoustique (guitare et harmo de Zach Williams), métal plus stoner quelquefois voisin du Molly Hatchet actuel et un feeling assez proche de certains titres de la Mule, le tout pour un ensemble très réussi, lui aussi boosté par les glissandi de bottleneck de Robby Rigsbee.
Cela dit, le groupe sait aussi manier des valeurs plus traditionnelles comme en témoigne la ballade typiquement sudiste, très skynyrdienne époque Ronnie : « Fools' Moon », embellie par de superbes parties de guitare « rossingtoniennes » éventuellement doublées à la tierce, histoire de... Arrivé là, l'auditeur est coincé, fait comme un rat : s'il est amateur de rock sudiste, il a bien compris que quelque chose arrive, et ce n'est pas un « Moving On » sur tempo modéré, entre Blackberry Smoke et Black Crowes qui va le faire décrocher. D'ailleurs « Picture Perfect », qui suit, l'accroche par les sentiments en le plongeant la tête la première dans une ballade très mélodique aux relents bluesies/gospel : l'est malheureux, le pôv' Zach, à se dépêtrer de ses rêves, comme d'hab', et il nous fait le partager de manière déchirante. Il va récidiver quelques titres plus tard avec « Motels And Highways », qui prend des accents de production à la Bob Seger, orgue compris. Pas une raison pour se lamenter toute la journée, et le son du boogie vient réveiller l'auditoire, le beat syncopé de « The Fix » hypnotise de façon classique, mais en douce l'harmo de Zak et la slide de Robby viennent sournoisement nous attaquer le cervelet. Vicieux avec ça ! Le très rusé et très sautillant « Rock 'N' Roll Me » vient confirmer en soulignant le boulot de Creed Slater derrière les fûts. Le bluesy « PO Box And A Postcard » renoue avec la veine Blackberry Smoke en laissant entrevoir des influences du côté de Paul Rodgers pour un Zach au coeur encore brisé, et « Wishing Well »... puise aux mêmes sources, sur un mode un peu plus heavy mais le groupe ne sait pas trop comment le terminer, s'en remettant pour la coda à la fluidité d'une brillante partie de guitare lorgnant sur le shred. Encore merci pour cette jolie pirouette ! L'album se termine par une prestation d'un Zach encore très malheureux, planté tout seul sous le ciel étoilé avec sa guitare acoustique et ses rêves après avoir trop picolé.
Cette mélancolique conclusion ne doit pas vous faire vous fourvoyer, car malgré quelques petites maladresses et imperfections, cet album-collecte recèle bien des trésors et le groupe, qui peut et doit encore progresser pour faire son entrée dans la cour des grands, a vraiment tout pour réussir, y compris le son du sud, cette recette après laquelle courent bien des Européens, et ça, ça vaut de l'or. Très bon album !
Y. Philippot-Degand